Blotties sous un ciel bleu éclatant, les plages de sable blanc de Zanzibar, autrefois animées, sont aujourd'hui désolées. Les bateaux de plaisance, jadis prisés des touristes, sont ancrés, attendant des visiteurs qui ne viennent plus. La Tanzanie, connue pour ses paysages époustouflants et sa faune diverse, traverse une période sombre suite aux récentes violences liées aux élections.
Le 29 octobre, des élections législatives et présidentielles controversées ont plongé le pays dans le chaos. Des rapports d'observateurs étrangers ont qualifié ces élections de frauduleuses, et plus d'un millier de personnes, en grande partie des manifestants, ont perdu la vie dans la répression excessive des forces de sécurité, rapportent des sources de l'opposition et des organisations de défense des droits de l'homme.
La réaction du gouvernement tanzanien a été de bloquer l'accès à Internet, limitant non seulement les communications à l'intérieur du pays mais rendant également difficile la vie pour les touristes, certains se retrouvant bloqués dans les aéroports. Alors que l'AFP a visité Zanzibar à la fin novembre, il était difficile de croiser d'autres visiteurs, même dans la capitale, Stone Town. "Nous avons choisi de venir ici, car nous évitons les grandes villes où la répression est forte", explique Amaia, une touriste espagnole.
Autre exemple, Jérémy Fuzel, un Français, a décidé de reporter son voyage initialement prévu durant les manifestations, estimant qu'il n'y avait pas de risque réel pour les étrangers. Pourtant, les inquiétudes sont bien fondées. Les défenseurs des droits humains localement, comme la militante Maria Sarungi Tsehai, demandent aux touristes de boycotter la Tanzanie, mettant en lumière une réalité sombre : "Il se peut que lors de vos activités de loisirs, vous tombiez sur des restes humains, de nombreux corps ayant été jetés dans l'océan".
Les retombées économiques sont déjà palpables. Nazir Adam, un bijoutier de Zanzibar, a constaté une réduction de moitié du nombre de touristes dans sa boutique. À Arusha, aux portes du Kilimandjaro, un hôtelier a vu son taux d'occupation chuter à moins de 30%, un choc comparé à 60-70% habituellement cette saison. Des centaines de réservations et plusieurs événements prévus pour décembre ont également été annulés.
Malgré ces signes préoccupants, l'Association tanzanienne des tour-opérateurs maintient une perspective optimiste, arguant que 80% des revenus se génèrent entre juin et octobre, considérant ainsi que l'année touristique est désormais terminée.
Pourtant, de nombreux experts, comme Didier Arino, directeur général de Protourisme, s'inquiètent de l'impact de cette crise sur l'avenir touristique de la Tanzanie. "La sécurité des touristes est la priorité. Les tour-opérateurs sont déjà en train de rediriger leurs clients vers d'autres destinations plus sûres", précise-t-il.
En plus des tensions politiques, des préoccupations pratiques surviennent. En juin, l'Union européenne a classé toutes les compagnies aériennes tanzaniennes comme à risque, compliquant davantage l'accès au pays. De plus, le gouvernement tanzanien a instauré de nouvelles taxes sur le tourisme, rendant les séjours moins attrayants pour les visiteurs.
La situation a largement impacté le secteur, où des appels au boycott, des manifestations programmées voire des émeutes potentielles ne font qu'aggraver les conditions. Le président de l'organisation de tour-opérateurs en France, Patrice Caradec, conclut que ces événements ne favorisent guère l'avenir de la Tanzanie comme une destination touristique prisée durant les fêtes de Noël. "La Tanzanie était sur la bonne voie, mais aujourd'hui, ce n'est plus le cas", ajoute-t-il avec un air de désillusion.







