Les violences sexuelles envers les nourrissons sont souvent qualifiées d'« insoutenables » et d'« impensables », mais elles demeurent un sujet tabou en France. Selon une enquête récente de la Mission interministérielle pour la protection des femmes (Miprof), 614 bébés ont été pris en charge pour des faits de violences sexuelles en 2024. Ces chiffres ne représentent que la pointe de l'iceberg, illustrant un phénomène largement sous-évalué.
Pour les pédocriminels, un enfant âgé de 0 à 2 ans est considéré comme « la victime idéale ». Dans ces premières années de vie, l'enfant ne peut pas dénoncer les abus ni se souvenir des événements traumatisants, engendrant une impunité que cherchent à exploiter les agresseurs. Marion Pierre, pédiatre au service de médecine légale à Rennes, souligne la vulnérabilité de ces tout-petits, qui n'ont pas les moyens d'exprimer leur souffrance.
Sarah el Haïry, Haute Commissaire à l’Enfance, affirme que ces chiffres ne sont que la partie visible d'une réalité alarmante. "On parle d'enfants incapables de parler, marcher ou demander de l'aide," dit-elle. Les professionnels du secteur, comme Aurélie Besançon de l'Office mineurs (Ofmin), insistent sur le fait que le chiffre noir est probablement bien plus élevé.
Les agresseurs, dont la majorité sont des hommes, se retrouvent souvent dans le cercle familial ou professionnel proche de l'enfant. Une enquête menée par France Info a également souligné que toutes les classes sociales sont concernées par ce fléau.
Un défi majeur réside dans la difficulté de prouver ces infractions. "Une fellation avec un bébé ne laisse pas de traces", explique Hélène Romano, psychologue et coautrice de l'étude "Le viol des bébés, repérage et prise en charge". Les signes d'un mal-être chez un nourrisson peuvent se manifester par des troubles du sommeil ou des changements dans les courbes de croissance.
Il est crucial que les professionnels de la santé et les parents soient formés pour reconnaître ces signaux d'alerte. Hélène Romano et Marion Pierre mettent également en garde contre la mémoire traumatique : des enfants agressés sexuellement peuvent ne manifester des troubles que plusieurs années plus tard, souvent par des comportements sexuellement agressifs.







