Le fils de Sophie (*) a été victime d'une agression sexuelle perpétrée par un animateur périscolaire à Paris entre 2018 et 2019. Aujourd'hui, avec les parents des 14 autres enfants touchés, elle lutte pour que justice soit rendue. À travers son récit, elle dévoile les épreuves que sa famille a endurées depuis que son fils, à 4 ans, a révélé avoir vécu l'innommable.
« J'avais tous les signaux sous les yeux et je n'ai rien vu », confie Sophie. Son fils, âgé de quatre ans à l'époque, a subi les abus dans le cadre d'activités périscolaires et à l'heure de la sieste. En tout, 15 enfants, tous issus de l'école Paul-Dubois, dans le 3e arrondissement parisien, sont réputés avoir été victimes de cet homme, qui, bien que suspendu, nie les faits, partageant ainsi le sentiment d'innocence qui prévaut jusqu'à ce qu'un procès ait lieu.
Au début, Sophie ne remarque pas les changements de comportement de son fils. Il présente des symptômes tels que des douleurs abdominales et des pleurs avant d'aller à l'école. Lorsqu'un email de l'établissement annonce la suspension de l'animateur pour agressions sexuelles, elle et son mari restent dans le déni. Toutefois, des incidents précédents refont surface, comme un jour où l'enfant se plaint de douleurs « aux fesses », détail que la mère associe à ses problèmes digestifs. « Je n'y avais pas prêté attention à l'époque », se désole-t-elle.
L'école face à l'impensable
Un autre événement retient son attention : un dimanche, le petit garçon demande à sa mère de l'aider aux toilettes, en faisant remarquer que son père pourrait lui faire mal. Malgré ces indices alarmants, Sophie ne peut s'empêcher de penser que son enfant ne pourrait pas être une victime. Un moment de tendresse où son fils affirme tout de même avoir un « secret » avec un adulte va changer la donne. Il finit par révéler à sa mère : « Oui, mais je ne veux pas dire, j’ai peur qu’il aille en prison ». Ce moment tragique convainc Sophie de retirer son fils de l'école.
« L'équipe pédagogique a été clairement dépassée. Ils n'ont pas su gérer la situation », déplore la mère, observant que les troubles de son fils s'exacerbent. Chaque nuit, elle le berce pour apaiser ses peurs liés à l'événement traumatique révoltant. « Les premières années furent les plus difficiles, il avait peur de s'endormir, redoutant une répétition de l'horreur », explique-t-elle. Le petit garçon a également refusé de manger pendant plusieurs jours, témoignant des conséquences psychologiques de cette agression.
Une traversée difficile vers la guérison
Aujourd'hui âgé de 12 ans, le fils de Sophie entre dans l'adolescence, une étape délicate. Elle explore divers moyens de l'aider, allant jusqu'à lui faire découvrir la natation pour lui redonner le goût de l'appétit. Maman dévouée, Sophie a dû cesser son activité professionnelle pour s’occuper de lui : « Cela demande une énergie monstre. Le plus difficile a été cette barrière invisible entre nous, je ne savais plus comment le réconforter tout en restant ferme ». Grâce à une approche multidisciplinaire incluant psychologues et autres spécialistes, elle apprend que la guérison de son enfant prendra du temps.
En parallèle de ses efforts personnels, Sophie s'engage également dans un combat judiciaire. Avec d'autres familles de victimes, elle espère que l'agresseur présumé sera finalement jugé. Actuellement, le dossier est en instruction, mais les victimes redoutent un non-lieu malgré des témoignages de professionnels de la santé. « Notre système judiciaire est défaillant pour traiter ces cas. À quel moment la parole d'un enfant est-elle considérée comme crédible ? », s'interroge-t-elle. Elle critique la façon dont l'enquête a été menée, expliquant que les enfants ont été entendus trop longtemps après les faits, rendant leur témoignage difficile.
Sophie reste pleine d'espoir : « Je refuse de laisser cet individu détruire notre vie. J'ai redécouvert mon enfant, compris ce qu'est la résilience, et je crois en son avenir. Ensemble, nous pouvons surmonter cela », conclut-elle avec détermination.
(*) Le prénom a été changé.







