Ce jeudi, l'Assemblée nationale a ratifié à l'unanimité une proposition de loi visant à reconnaître et réhabiliter les personnes condamnées pour homosexualité en France, une démarche qui devrait conduire à un amendement entre députés et sénateurs discordants sur la question de l'indemnisation.
“Ce que nous célébrons aujourd'hui, c'est l'histoire de ceux dont le seul crime était d'aimer,” a souligné Aurore Bergé, ministre déléguée à l'Égalité femmes-hommes. “L'homophobie a été une politique d'État. Cette responsabilité ne peut être éludée, elle doit être pleinement affirmée.” Ce texte se focalise sur la politique discriminatoire existante entre 1942 et 1982, prévoyant une compensation de 10 000 euros pour les condamnés, accompagnée de 150 euros pour chaque jour d'emprisonnement.
Cependant, lors des débats, le Sénat a restreint cette période à partir de 1945, arguant que la République ne devrait pas “s'excuser pour les atrocités du régime de Vichy.” Il a également exclu entièrement le volet indemnitaire. En réaction, l'Assemblée a rétabli l'article du sénateur socialiste Hussein Bourgi dans sa version d'origine. Une commission mixte paritaire (CMP) regroupant sept députés et sept sénateurs sera mise en place pour élaborer une version de compromis dans les plus brefs délais.
Hervé Saulignac, député socialiste et rapporteur du texte, a précisé : “Reconnaître un préjudice implique nécessairement de le réparer. Il s'agit d'une démarche essentielle, tant sur un plan symbolique que moral.” À ce sujet, il a noté qu'il était logique de faire démarrer la période concernée à 1942, puisque la loi fixant un âge de consentement différent pour les relations homosexuelles avait été maintenue après la guerre.
Le projet vise à réhabiliter également ceux condamnés pour outrage public à la pudeur, une infraction qui touchait principalement des hommes et qui a engendré près de 50 000 condamnations entre 1942 et 1982, comme l'indique Régis Schlagdenhauffen, chercheur à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS).
Bien que certaines victimes soient décédées, d'autres, désormais âgées, pourraient encore demander réparation. Les débats autour de ce sujet soulignent l'importance d'une reconnaissance formelle des injustices passées et d'une action concrète pour rétablir la dignité de ceux qui ont souffert de cette politique d'État.
Pour aller plus loin, rappelons que d'autres législations ont également réprimé l'homosexualité sans en faire un acte pénalement répréhensible. Cette nouvelle initiative marque un tournant significatif vers l'égalité et la responsabilité dans la société française.







