Le 12 octobre, le Parlement français a voté à l'unanimité une loi pour réhabiliter les femmes condamnées pour avortement avant 1975. Cette avancée, portée par Laurence Rossignol, ancienne ministre des Droits des femmes, s’inscrit dans un contexte historique, cinquante ans après la loi Veil qui dépénalise l’avortement en France.
Entre 1870 et 1975, plus de 11 660 femmes et personnes ayant facilité des avortements ont été jugées et condamnées. Si l’adoption de cette loi est saluée comme une victoire par des associations féministes comme Choisir la Cause des Femmes, l'absence d'indemnisation pour les victimes laisse un goût amer. Ana Cuesta, présidente de l'association, a exprimé sa frustration face à cette nouvelle, soulignant que des avancées sur les droits des femmes semblent souvent rester symboliques, sans accompagnement financier.
Laurence Rossignol a défendu cette position, arguant qu'il était complexe d'indemniser toutes les victimes, y compris des individus aux comportements douteux tels que ceux ayant pratiqué des avortements clandestins. Cette absence de mesures financières pourrait transformer cette loi, pourtant significative, en un simple geste mémoriel sans impact réel.
Une commission indépendante pour préserver la mémoire
La nouvelle législation prévoit la création d’une commission nationale indépendante chargée d’identifier les victimes et de documenter l’histoire de ces femmes. Selon des initiatives comme celles de Bibia Pavard et Isabelle Foucrier, ce travail est urgent, car beaucoup de ces femmes sont âgées et leurs histoires doivent être entendues. Ana Cuesta a également évoqué l’importance d’accorder un budget adéquat pour le fonctionnement de cette commission.
En parallèle, le combat pour la mémoire des femmes mortes suite à des avortements clandestins prend de l’ampleur. L’association milite pour l’érection d’un monument à Paris en leur hommage, un acte symbolique mais nécessaire.
Des enjeux persistants en matière d'accès à l'IVG en France
Alors que la France célèbre cette avancée, des voix s'élèvent pour rappeler que le contexte législatif concernant l’avortement demeure fragile. Ana Cuesta souligne que « 20 % des femmes en France doivent se déplacer pour obtenir un avortement », témoignant ainsi des insuffisances dans l'accès à ce droit fondamental. De plus, certains hôpitaux parisiens ne proposent plus certaines méthodes d’IVG, ce qui complique davantage la situation.
Il est important de noter que, même à l’échelle mondiale, les droits reproductifs continuent d’être menacés. Selon les données de l'Organisation mondiale de la santé, près de 40 % des femmes vivent dans des pays où l'avortement est restrictif, les poussant à avoir recours à des méthodes non sécurisées.
Le dernier vote des membres du Parlement européen pour élaborer un mécanisme facilitant l’accès à des avortements sûrs à toutes les femmes en Europe montre que la lutte pour ces droits est loin d’être terminée. Les rétractations des droits à l’avortement aux États-Unis et dans d'autres pays européens suscitent des inquiétudes et appellent à une mobilisation continue.
Cette nouvelle loi, bien qu’importante, appelle à des actions concrètes pour garantir des droits réels et l’indemnisation des victimes du passé. Comme l’a déclaré Ana Cuesta, il est impératif d’aller au-delà du symbolique pour répondre aux véritables besoins des femmes en matière de droits reproductifs.







