Dimanche, la Guinée est appelée à voter pour élire son président, quatre ans après que la junte militaire, dirigée par le général Mamadi Doumbouya, a pris le pouvoir lors d'un coup d'État. Doumbouya, qui avait initialement promis de ne pas se présenter, est devenu le grand favori d'un scrutin controversé où les principaux opposants ont été écartés.
L'opposition a dénoncé une « mascarade électorale » et a appelé au boycott, rappelant que l’ancien président Alpha Condé, ainsi que les ex-Premiers ministres Sidya Touré et Dalein Diallo — tous en exil — n’ont pas eu la possibilité de se porter candidats. Diallo a critiqué ce processus comme étant une tentative de légitimer la confiscation du pouvoir par la junte, tandis que l'ONU a exprimé ses préoccupations concernant des intimidations ciblant des membres de l'opposition.
Les promesses initiales des militaires de transférer le pouvoir aux civils d'ici la fin de 2024 semblent désormais oubliées, alors que le pays subit une répression croissante, marquée par des emprisonnements et des disparitions de voix dissidentes. Gilles Yabi, directeur de Wathi, souligne la régression vers des régimes autoritaires qu'a connue la Guinée depuis son indépendance en 1958.
Ce scrutin, qui devrait impliquer 6,8 millions d’électeurs, présente Doumbouya comme le candidat le plus solide, une situation aggravée par le manque de visibilité de ses rivaux, souvent peu connus. Les résultats provisoires du scrutin devraient être annoncés dans les 48 heures suivant le vote.
Les autorités de sécurité ont déjà affirmé avoir agi contre un groupe armé jugé menaçant, renforçant l’image d’un état de tension omniprésent. Ce scrutin survient dans un contexte général en Afrique, où de nombreuses élections ont été marquées par desregistres autoritaires, faisant écho à des cas similaires dans des pays comme le Cameroun et la Côte d'Ivoire.
- Une élection pour légitimer le pouvoir -
Cette élection semble davantage destinée à légitimer le pouvoir du général Doumbouya qu'à offrir une réelle alternative politique. L'analyste politique Kabinet Fofana, situé à Conakry, souligne l'importance de l’adhésion électorale, après l’approbation d’une nouvelle Constitution par le peuple en septembre, qui a encouragé une participation étonnamment élevée, officiellement fixée à 91%. Cette nouvelle Constitution autorise également les membres de la junte à se porter candidats, ce qui ouvre la voie à Doumbouya.
À l'inverse de ses voisins sahéliens comme le Mali ou le Burkina Faso, Mamadi Doumbouya a maintenu de bonnes relations avec la France et d’autres partenaires internationaux. Une de ses priorités annoncées a été l’exploitation imminente du gisement de fer de Simandou, qui promet des revenus significatifs pour le pays. « La transition a été marquée par des travaux d’infrastructures économiques, attirant l’attention des Guinéens », a déclaré Yabi. Néanmoins, ce succès matériel ne garantit pas une gouvernance stable ou équitable à l’avenir.
Malgré ses richesses en ressources, la Guinée fait face à des défis économiques criants, avec plus de la moitié de sa population vivant en dessous du seuil de pauvreté, selon des données de la Banque mondiale. Le monde attend avec impatience l’issue de ce scrutin crucial qui pourrait dessiner l’avenir politique du pays.







