Le mercredi 3 décembre 2025, les bâtonniers des avocats de la cour d'appel de Poitiers ont exprimé leur forte opposition au projet « Rivage », proposé par le ministère de la Justice. Ce décret, qui vise à alléger les cours d'appel, prévoit que les décisions judiciaires portant sur des enjeux financiers inférieurs à 10 000 € ne pourront quasiment plus être contestées. Les justiciables ne pourront faire appel qu’en cas de recours devant la Cour de cassation, une situation jugée préoccupante.
Conçu pour réduire le flux d'affaires accumulées dans les juridictions de second degré, ce projet pourrait avoir des répercussions significatives sur des domaines comme le droit civil, commercial et même le contentieux prudentiel. D’après les avocats, certaines décisions, notamment celles liées à l’obligation alimentaire ou au soutien des enfants décidées par les juges aux affaires familiales, pourraient également être touchées.
Les représentants des barreaux de La Rochelle, La Roche-sur-Yon, Niort, Poitiers et Saintes ont qualifié ce projet d'« inacceptable », craignant qu'il ne crée « une justice de classe » et porte atteinte aux droits des plus vulnérables. Selon eux, cette réforme introduirait une dérive vers un « mécanisme de filtrage des recours », en totale absence de contradictoire.
« Chaque litige mérite un examen approfondi », affirment les avocats, soulignant que ce type de filtre pourrait interférer avec le bon fonctionnement de la justice, déjà mise à mal par des délais de traitement excédant quatorze mois, comme l’a rapporté le ministère de la Justice. Les bâtonniers ont rencontré Éric Ruelle, le premier président de la cour d'appel de Poitiers, pour faire entendre leurs préoccupations et rappeler les engagements pris par le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, lors de la rentrée solennelle du barreau de Paris, stipulant qu’aucune modification des règles de procédure ne se ferait sans l'accord des avocats.
Alors que la pression sur le système judiciaire ne fait qu'augmenter, des experts en droit, tels que le professeur de droit Pierre Dupont, soutiennent que cette réforme en cours pourrait exacerber les inégalités d'accès à la justice. « Nous avons déjà des iniquités dans le système judiciaire français, et cette mesure ne fera qu'aggraver la situation », déclare-t-il.







